Accueillir des enfants arrivant d'Ukraine ou d'autres zones de guerre
Afin d'accompagner les équipes et les personnels qui accueillent des enfants arrivant d'Ukraine, et plus largement tous les enfants arrivant d'une zone de conflits, un espace de formation m@gistère a été conçu par la direction générale de l’enseignement scolaire et l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche.
Le parcours m@gistère est accessible dans sa totalité après authentification en cliquant ici.
Le site éducation.gouv.fr met à disposition un document pour les ressortissants ukrainiens, des informations relatives à la scolarisation, aux aides financières et au soutien pour l'apprentissage du français ainsi que les contacts en académie pour l'accueil des élèves.
Les ressources mises à disposition dans le parcours sont pensées
- pour être utiles à la compréhension de la situation,
- pour aider à se préparer à l’accueil individuellement et en équipe,
- pour faciliter l’inclusion des enfants dans la classe et les accompagner dans leurs apprentissages.
Ce parcours est organisé en trois grandes parties. Il présente des vidéos et des ressources sélectionnées ou élaborées par des enseignants et des personnels des corps d’inspection avec le concours de spécialistes, tant dans la gestion de crise que dans le domaine du soin aux enfants et aux jeunes.
Vous trouverez ci-dessous des ressources issues de ce parcours et des informations sur son architecture.
1 - Se préparer à accueillir des enfants arrivant de zones de conflits
Nous vous proposons de visionner ici :
- trois interventions de Thierry Baubet, médecin pédopsychiatre, qui expose la diversité des situations vécues par les enfants. Son propos permet de comprendre ce qu’ils peuvent ressentir et ce qui peut se manifester en classe. Fort de son expertise dans la prise en charge des enfants réfugiés et dans le psychotraumatisme lié à la guerre, il propose des recommandations et aide au positionnement des adultes.
- deux interventions de Christophe Marsollier, inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche, qui donne des repères pour mettre en œuvre une éthique de la relation pédagogique qui favorise la prise en compte des vulnérabilités des enfants et des jeunes arrivant des zones de conflits.
Vous retrouverez sur le parcours m@gistère une intervention complémentaire de Brigitte Moltrecht, médecin conseil du directeur général de l’enseignement scolaire, qui précise le rôle de l’école et de ses personnels dans la construction d’un cadre structurant et sécurisant à même de favoriser le bien-être et les apprentissages des enfants accueillis.
1.1 - Quelles sont les spécificités d’un enfant arrivant d’un territoire en guerre ?
Objectifs : Appréhender la diversité des situations vécues par les enfants arrivant d'Ukraine. Connaître les invariants et les spécificités.
Spécificités d'un enfant arrivant d'un territoire en guerre
Alors, concernant ces enfants qui arrivent de territoires qui connaissent la guerre depuis quelques semaines pour une partie d'entre eux et depuis bien plus longtemps pour ceux qui viennent de l'est du pays, il faut imaginer qu'il y a une grande diversité, bien sûr, dans l'état de santé et dans le vécu de ces enfants.
D'abord, le premier point, c'est que ces enfants avaient une vie avant la guerre. Ils ne sont pas des enfants de la guerre, donc ils avaient une vie et ils avaient tous des forces et des difficultés, des compétences et éventuellement des problèmes, parfois des problèmes d'apprentissage, parfois des troubles autistiques, parfois de l'hyperactivité.
Tout ce qu'on trouve chez tous les enfants, partout dans le monde, existe aussi chez les enfants ukrainiens, bien sûr. Et puis, il y a tout ce qu'ils ont vécu pendant cette période de guerre. Alors là, on pense souvent au traumatisme.
C'est vrai qu'ils ont expérimenté la plupart d'entre eux, en tout cas, des événements potentiellement traumatiques. Ces événements potentiellement traumatiques, c'est tout ce qui met brutalement l'enfant dans un grand danger ou ses proches dans un grand danger, danger de blesser, tuer, etc.
Et ces événements-là, ils en ont certainement tous vécu à des degrés différents. Certains ont vécu vraiment une succession d'événements traumatiques particulièrement intenses et d'autres ont sans doute été plus protégés, ont été dans des zones qui ont été moins touchées par la guerre ou sont sortis plus tôt du pays, sont restés exposés moins longtemps.
Donc, une diversité d'exposition et des traumatismes. Mais il serait tout à fait préjudiciable de limiter les conséquences de la guerre à cette question de traumatisme. Parce qu'il y a aussi beaucoup d'autres choses qui se passent pour l'enfant. Il y a un stress permanent.
Il y a une désorganisation de la société, une désorganisation des routines, l'arrêt de l'école, l'arrêt de la socialisation. Et puis, il y a l'inquiétude pour les parents. Et puis, il y a finalement la séparation familiale pour la plupart d'entre eux, puisque majoritairement, ces enfants ne sont venus qu'avec leur mère et pour certains, même sans parents.
Donc, ça veut dire que le père reste dans la guerre. Que la famille est disloquée. Et que pour l'enfant, le père est toujours en danger de mort. Et d'ailleurs, c'est parfois plus qu'un danger. Malheureusement, il y a des enfants qui, dès maintenant, sont endeuillés par cette guerre et malheureusement, d'autres qui vont l'être dans les semaines et les mois qui viennent. Donc, on voit qu'il y a des traumatismes. Des séparations, une désorganisation complète de l'univers de l'enfant qui fait qu'il ne peut plus s'appuyer sur rien et avoir confiance en rien, et qu'il ne peut plus se projeter.
Et puis il y a l'arrivée en France. Et là, ça peut paraître. Ça peut paraître presque mineur, mais c'est quand même important. Il y a un stress acculturatif, le stress lié au fait d'arriver dans une société qu'on ne connaît pas avec une langue qu'on ne connaît pas.
Et comment on se débrouille avec tout ça, tout ça avec en arrière fond, la préoccupation de ce qui arrive au père ou de ce qui arrive à ses tantes ou à ses grands-mères, qui sont restées en Ukraine.
On voit que ça fait une très lourde charge et en même temps plein de situations différentes parce qu'il y a eu des expositions différentes, parce qu'il y a des configurations familiales différentes, parce qu'il peut y avoir des antécédents psychologiques, individuels, etc.
Donc, il faut avoir en tête cette grande diversité de situations.
1.2 - Qu'est-ce que le psychotraumatisme ?
Objectifs : Savoir ce qu'est un psychotraumatisme, connaître ses manifestations pour mieux comprendre ce qui peut se jouer avec certains élèves et bien appréhender son positionnement en tant que professionnel de l'éducation.
Psychotraumatisme
Ce qui est certain, c'est que beaucoup de ces enfants ont été confrontés une fois ou plusieurs fois à des événements que l'on appelle des événements traumatogènes. Ça veut dire des événements qui sont susceptibles de causer un traumatisme, mais ils ne causent jamais de traumatisme chez tout le monde.
Il faut bien différencier l'événement, qui est un événement potentiellement traumatique et le vécu psychique qui peut être un traumatisme. Mais si une bombe explose, une partie des enfants qui était dans le coin vont être traumatisés et d'autres non pour pleins de raisons, mais c'est comme ça.
Donc, avoir vécu des événements traumatiques, potentiellement traumatiques, ne veut pas dire qu'on a un trouble post-traumatique et qu'on est traumatisés. C'est une première chose. Alors des événements qui peuvent donner des troubles post-traumatiques, c'est l'ensemble des événements qui paraissent menacer la vie ou l'intégrité de la personne, de l'enfant ou de ses très proches.
Donc, des violences, une explosion, des bombardements, des tirs, mais aussi voir des corps dans la rue, par exemple, voir des gens morts ou mourir. Toutes ces choses-là sont susceptibles de provoquer des traumatismes. Alors, quand, quand un enfant vit un événement traumatique, qu'il est traumatisé par cet événement, il ne va pas forcément montrer immédiatement des signes.
Il peut y avoir une phase parfois très longue où l'enfant semble aller à peu près bien. Et ça, c'est souvent vrai dans toute la période où il y a une grande instabilité et où l'enfant ne s'est pas encore posé quelque part. Quand on passe de centre en centre, d'hôtel en camp, etc. Sur tout ce chemin, les enfants ne s'autorisent pas à craquer et à exprimer leur détresse. Il faut qu'ils soient dans un environnement relativement stable et sécurisé pour le faire.
Et puis, il y a aussi la question qui est très importante pour les enfants, c'est de ne pas alourdir la détresse de leurs parents et de leur mère. Donc, il y a souvent cette préoccupation de cacher sa souffrance à ses proches et à sa mère pour ne pas la rendre encore plus triste ou la déstabiliser encore plus ou l'anéantir.
Alors, ces symptômes qui peuvent apparaître parfois plusieurs semaines ou plusieurs mois après les événements, on ne va pas forcément les constater dès qu'un enfant va être scolarisé, ça peut apparaître secondairement.
Il y a plusieurs groupes de symptômes. Le premier, qui est très caractéristique, c'est ce qu'on appelle les reviviscences. Reviviscence, ça veut dire que l'enfant va littéralement revivre certains aspects des scènes les plus traumatiques qu'il a vécues. Il va, il va entendre des bruits. Il va revoir les images qui vont s'imposer à lui, même s'il ne veut pas, même s'il essaye de lutter. Et il va ressentir des odeurs, éventuellement les sensations corporelles. Il est vraiment à nouveau dans la scène du traumatisme et lorsque ces reviviscences surviennent, l'enfant ressent la même détresse qu'au moment où c'est arrivé, même si c'est trois mois après et qu'il est en sécurité et qu'il y a des adultes pour s'occuper de lui. Il est de nouveau dans la même détresse totale qu'il était sous les bombes, etc.
Alors ça, ça peut donner des symptômes émotionnels spectaculaires parfois, c'est-à-dire un enfant qui a... Parfois, ça peut même aller jusqu'à des flashbacks. L'enfant n'est plus... il est ce qu'on appelle dissocié. Il répond même plus quand on l'appelle. Il est en train de revivre son truc, il est en pleine panique, en plein désarroi.
Et ça prend quelques secondes ou quelques minutes. Parfois, ça peut déclencher des réactions de colère gigantesques. Son rapport, finalement, avec ce qui est en train de se passer, ça peut être une frustration minime ou des choses comme ça, mais qui va déclencher une détresse majeure chez l'enfant?
C'est ce type de choses qui peuvent se produire, alors ça peut se manifester aussi dans le jeu avec des enfants pour les plus jeunes qui vont reproduire des scènes traumatiques dans leurs jeux, avec des animaux, avec des dessins...
Et ce sont ce qu'on appelle des jeux traumatiques. Donc, ce sont ce ne sont pas des jeux, en fait. C'est-à-dire que l'enfant n'y prend pas de plaisir, ne s'amuse pas ou ne crée pas, ne peut pas interagir pendant ces séquences, s'il fait par exemple une maison qui est détruite.
Il refait ça sans cesse. Et si vous arrivez en disant « il y a en nounours ce qui pourrait protéger la maison, etc. » Cela ne l'intéresse absolument pas. C'est une répétition mortifère de la scène traumatique. C'est ça qu'on appelle le jeu traumatique. C'est un symptôme assez caractéristique. Ça, c'est tout ce qu'on appelle les reviviscences.
Ensuite, vous avez des symptômes d'évitement. Évitement, c'est éviter tout ce qui pourrait lui refaire penser et tout ce qui pourrait déclencher une reviviscence. Donc, c'est certains lieux, certaines personnes. Mais c'est aussi certaines émotions. Si un enfant était dans un état particulièrement joyeux, en train de s'amuser au moment où le trauma est survenu, il pourrait avoir la crainte que s'il est de nouveau joyeux, ça recommence par exemple.
Donc l'évitement quand il est important fait qu'il va y avoir une restriction progressive des capacités et de la vie de l'enfant et y compris de sa vie psychique et intellectuelle, avec parfois des retentissements cognitifs qui sont importants. Les enfants qui ont des troubles post-traumatiques importants peuvent donner l'impression d'avoir des retards cognitifs, des retards de développement et une impossibilité à acquérir de nouvelles compétences, de nouvelles connaissances parce qu'ils sont sans arrêt en train de lutter contre les reviviscences et de chercher des stratégies pour pas que ça revienne.
Donc, les reviviscences, l'évitement. Le troisième groupe de symptômes, c'est ce qu'on appelle l'état d'hyper alerte, c'est-à-dire que l'enfant est sans cesse sur le qui-vive. Il a été saisi par l'effroi du traumatisme qu'il n'avait pas vu venir. Et donc, il se tient d'une certaine manière, toujours sur ses gardes, toujours dans un état d'alerte, comme s'il était devenu la sentinelle de lui-même. Et s'il y a un bruit il sursaute et le soir, il ne peut pas arriver à s'endormir et à se laisser dans le sommeil parce qu'il a peur et qu'il veut garder le contrôle, etc.
Et enfin, vous avez un ensemble, quatrième groupe de symptômes, c'est un ensemble de symptômes émotionnels et cognitifs sur le plan cognitif. On peut avoir des troubles mnésiques qui peuvent être présents et sur le plan émotionnel. On peut avoir des sentiments de tristesse, de colère, voire de rage, de honte, de culpabilité. Tous ces sentiments négatifs, de détachement des autres, de perte de la capacité à prendre du plaisir des choses, etc.
Donc, pour parler de troubles post-traumatiques il faut que l'ensemble de ces symptômes soient présents, les quatre que je vous ai listés et que ça soit présent pendant une durée de plus d'un mois. C'est complètement normal, juste après un événement traumatique d'avoir ces symptômes. On parle de stress aigu, mais chez beaucoup d'enfants, ça va se rétablir en quelques semaines, ils vont trouver des ressources pour se rétablir. Et chez d'autres, malheureusement, ça va durer. Et c'est à ce moment-là qu'on parle de troubles post-traumatiques. Et en cas trouble post-traumatique, ça ne passe pas tout seul. Il faut, il faut des soins, il faut une psychothérapie. Voilà un petit peu ce qu'on peut dire sur le trouble post-traumatique.
1.3 - Quel cadre offrir aux enfants et aux jeunes arrivant d'un territoire en guerre ?
Objectifs : Construire un cadre sécurisant, un accueil structurant pour les enfants et les jeunes. Quel rôle pour chacun ? Quelle relation pédagogique et éducative mettre en place ?
Recommandations pour la prise en charge
Alors quel conseil on peut donner aux enseignants quand on est psy, ce n’est pas si facile, faut se représenter un peu le métier d'enseignant, ce que nous on peut faire que partiellement. Et bien sûr, ce ne sont pas des conseils de psychothérapie parce que chacun doit rester à sa place et chacun un rôle important à jouer vis-à-vis de ses enfants, de sa propre place. Et je pense que les psys ne doivent pas se transformer en éducateurs et les enseignants ne doivent pas se transformer en psy. C'est un risque, c'est un risque parce que ces enfants qui ont vécu de telles situations et puis nous-mêmes, on a tellement vu cette guerre en Ukraine et ces atrocités à la télé que ça peut provoquer chez nous, quand on les accueille des réactions débordantes. L'empathie, c'est très bien. Mais attention quand même à certains mouvements qu'on peut avoir comme une trop grande sympathie ou une trop grande, trop grande ou trop grande proximité.
Le danger de se prendre pour le parent ou pour le psy de l'enfant, de vouloir tout lui apporter, tout réparer, réparer la guerre. On a tous envie de réparer la guerre. Et ça, bien sûr, ce n’est pas possible. On peut avoir aussi des réactions de fascination qui peuvent aller parfois jusqu'à une sorte de curiosité presque morbide qui est mais "raconte nous tes traumas. Dis-nous ce que tu as vu, l'horreur que tu as vue" etc. Tout ça, bien sûr, c'est des choses à éviter soigneusement. Je dirais que ces enfants ils doivent être accueillis comme tous les enfants doivent être accueillis avec bienveillance et attention.
Et je pense qu'ils ont besoin, un grand besoin de routine et d'un cadre sécurisant. Actuellement, les autorités nous demandent beaucoup ce que les psys vont faire pour les enfants. Et moi, je réponds que pour la santé mentale des enfants, la première chose avant les psys, c'est la stabilité de l'hébergement, de l'environnement et l'école ou, pour les plus petits, la crèche ou la halte-garderie qu'il y ait ce temps de socialisation enfantine et d'apprentissage, qui soit séparé des temps familiaux et qui permettent à l'enfant de s'appuyer sur des choses qui, au moins, sont solides et qui ne vont pas bouger, qui ne vont pas bouger dans la perspective de son année.
Ça, c'est essentiel. L'enfant a besoin de repères sécurisants, de routine, de choses qu'il répète, etc. Et bien sûr, à certains moments, étant donné que certains de ces enfants auront des besoins particuliers en termes d'attention, en termes de contenance, on en reparlera.
Parfois, il peut y avoir des frictions, c'est à dire on peut se dire mais en lui imposant des choses, est ce que je ne suis pas en train de lui faire du mal ? Est-ce que je suis en train de blesser davantage ? Etc. Et je pense que non. C'est très important que les enfants, que tous les enfants, même les enfants ukrainiens aient un cadre et qu'ils aient aussi des limites sur ce qu'ils peuvent faire, ce qui est approprié ou pas, ce qu'ils peuvent dire, à qui, à quel endroit, qu'on leur explique tout ça.
Et mon expérience, c'est vraiment que ça aide beaucoup ces enfants. Après, il y a des moments plus difficiles. Il y a des moments où certains enfants peuvent avoir des crises émotionnelles. Il y a des moments où ils peuvent se mettre à parler de choses.
Je pense que c'est important dans ces moments-là, de bien se représenter. Pour les enfants traumatisés, les crises émotionnelles sont souvent des reviviscences qui sont déclenchées par des choses minimes, mais qui viennent mettre à mal une défense de l'enfant contre eux.
Ce qui le hante en fait, et c'est ce qui le hante, qui envahit à ce moment-là. Et c'est un symptôme qu'il faut savoir constater et contenir et accompagner. Et effectivement, il faut prévoir que ces enfants puissent sans doute facilement être sortis de classe un moment qu'il y ait une tierce personne qui puisse passer quelques minutes avec eux pour les sécuriser pour qu'ils se calment avant de revenir, etc. C'est ça. C'est un point important, ces crises émotionnelles, elles peuvent survenir ? Ces enfants auront également, ceux qui ne vont pas très bien des difficultés d'apprentissage, en tout cas au tout début.
Et là, je pense que c'est là aussi un accompagnement bienveillant et un repérage des enfants qui ont des troubles. Parce que ces enfants, ils ont été pendant plusieurs semaines ou plus dans un univers complètement chaotique. Et là, ils vont retrouver quelque chose d'un peu plus normé où on attend des choses d'eux aussi et à la fois à la fois. Ça va leur faire du bien. Et puis à la fois. Certains vont sans doute utiliser cet espace pour exprimer des choses qui n'ont pas pu ou qui n'ont pas eu l'occasion d'exprimer ailleurs. Donc, je pense que c'est un endroit, l'école, où on va voir que l'école en elle-même est un soin, pratiquement pour la plupart de ces enfants, mais que pour certains enfants, au contraire, ça va, ça va. Ça va démasquer des difficultés qui sont déjà là, qui ne sont pas, qui ne seront pas créées par l'école, mais qui vont se révéler parce qu'il y a un cadre autour de l'enfant qui permet qu'elles se révèlent.
Et ces enfants-là, c'est là qu'il faudra avoir un travail de réflexion avec des psychologues de l'Éducation nationale et d'autres acteurs, ces enfants-là, ceux qui ont des troubles post-traumatiques ou d'autres troubles durables sur plusieurs semaines. Il faut vraiment les orienter vers des vers des soins. On soigne très bien les troubles post-traumatiques de l'enfant. Il suffit d'orienter vers un soignant.
Quelle éthique de la relation pédagogique ?
L'accueil d'un enfant arrivant d'une zone de conflit ou d'un pays en guerre fait partie des situations éducatives et pédagogiques délicates sur le plan relationnel. C'est lors de ces situations délicates que les décisions et micro décisions didactiques, éducatives et pédagogiques que l'on est amené à prendre lorsqu'on est enseignant que ces décisions peuvent s'avérer complexes à prendre.
La recherche d'une posture éthique peut permettre d'éviter de commettre des oublis, des maladresses ou des erreurs, notamment dans trois moments pédagogiques délicats qui reviennent régulièrement en classe. Le premier de ces moments, c'est le moment d'accompagnement, d'une résistance, d'une difficulté, d'un élève.
Difficulté à comprendre qui est souvent due au manque de maîtrise de la langue, mais aussi difficulté parce que cet enfant ne dispose pas tout à fait des mêmes repères sur le plan des savoirs. Deuxième type de moment, c'est le moment d'évaluation qui est un moment où effectivement, déjà, pour tous les élèves, c'est un moment fragilisant et qui nécessite, en termes de préparation, de passation de l'évaluation, mais aussi d'exploitation des résultats, une attention particulière vis-à-vis de ces enfants, de ces jeunes qui, bien sûr, sont dans une forme de handicap scolaire eu égard à ce qu'ils ont vécu et au temps d'adaptation qui va leur falloir pour pouvoir se retrouver au niveau de leurs camarades.
Et donc, cela demande bien sûr une forme de bienveillance, de réassurance et de donner des signes d'espoir et d'éducabilité vis-à-vis de ces enfants qui doivent douter d'eux-mêmes, bien sûr, dans ces moments de grande fragilité.
Enfin, dans l'exercice de l'autorité, il y a là un troisième moment délicat parce que même si parmi ces enfants, certains peuvent avoir des moments ou avec des actes qui témoignent d'un mal-être, qui sont des symptômes d'un mal-être, il s'agit bien de conserver un cadre qui soit rassurant pour la famille et qui montre que l'école accompagne au mieux l'enfant, même dans des moments où son comportement n'est pas forcément adapté.
Alors, cette éthique, lorsqu'on parle d'éthique, on parle en fait d'une réflexion morale argumentée en vue du bien agir. L'éthique, c'est une forme de disposition psychique, une posture par laquelle, en tant que personnel de l'Éducation nationale, on s'interroge parfois même collectivement sur la décision la plus juste à adopter dans l'intérêt de cet élève. L'éthique interroge donc la morale, les devoirs qui sont ceux d'un personnel, d'une équipe envers un élève. Il s'agit donc d'une forme d'espace de réflexion, de questionnement, voire de délibération sur la conduite la meilleure à adopter pour cet élève.
Enfin, on peut considérer que l'éthique est une forme de posture, une posture qui relève de la sagesse pratique, de la philosophie de l'action. Et donc en matière d'éthique, il y a quatre grandes orientations qui peuvent guider la prise de décision dans un moment délicat.
C'est tout d'abord tout d'abord se demander si on est bien dans le cadre. On respecte bien la déontologie de tout acteur du service public. Est-ce qu'on respecte bien le droit et on respecte bien les devoirs vis-à-vis de cet élève?
Deuxième type d'orientation en matière d'éthique, c'est l'orientation un peu conséquentialiste. On anticipe quelles peuvent être les conséquences d'une décision vis-à-vis de ces élèves, et là, cela suppose de faire preuve de responsabilité, d'anticiper parfois à moyen et à long terme les décisions que l'on prend, notamment lorsqu'il s'agit de décisions qui peuvent être graves vis-à-vis d'un élève qui a vraiment du mal à s'adapter dans ses comportements avec la communauté scolaire.
Troisième type d'orientation éthique, c'est cette orientation par laquelle on convoque des vertus relationnelles et humanistes d'un éducateur, de quelqu'un qui est engagé dans une relation éducative. Et donc, c'est bien sûr dès lors que l'on fait preuve de prudence, de patience, d'exigence, de bienveillance. On est dans cette posture vertuiste qui est une posture éthique en elle-même.
Et puis, on peut distinguer vis-à-vis notamment de ces jeunes venant de pays en situation de conflit ou de guerre, donc des jeunes qui ont été vulnérabilisés par leur vécu personnel. Des jeunes qui manifestent une telle fragilité qu'ils ont besoin de soins, qu'ils ont besoin d'une très grande bienveillance et qu'ils ont besoin d'une attention toute particulière vis-à-vis de leurs besoins fondamentaux.
On est très proche d'être dans la posture du soin, du soin clinique et on a certains de ces élèves en très grande fragilité qui méritent, au-delà de la prudence, de la bienveillance habituelle d'être dans cette posture de soin tout particulier. Voire d'être signalés vis-à-vis du médecin scolaire, vis-à-vis des psychologues de l'Éducation nationale pour bénéficier d'un accompagnement complémentaire et particulier.
Alors, on voit bien que finalement, l'éthique relationnelle s'observe dans la manière de communiquer, d'accorder sa confiance à ses élèves et de leur exprimer notre considération et donc de le faire positivement, de valoriser les progrès.
Les premiers progrès, de prendre le temps d'être présent à l'élève dans les moments délicats, d'utiliser les maladresses, les erreurs de manière positive, comme des éléments qui renseignent l'élève sur l'état de ses difficultés et de répondre à ses besoins avec un engagement, patience et donc d'exiger le meilleur. Et on est bien dans cette recherche d'équilibre qui fait de l'éthique le cœur de la qualité de la relation pédagogique.
Faire preuve d'écoute et accueillir les émotions
Avec ces enfants qui viennent, ces adolescents qui viennent de zones de conflit, de pays qui ont éventuellement traversé des moments difficiles, ces enfants vont avoir besoin de... après des moments délicats dans leur vie personnelle, de trouver des appuis pour manifester leur résilience, résilience et cette capacité à développer des comportements qui permettent de surmonter les échecs traumatiques, éventuellement l'adversité dans laquelle on s'est trouvé. C'est donc la capacité à retrouver un état d'équilibre après un événement exceptionnel. Il s'agit donc d'une aptitude à construire et à vivre de manière satisfaisante en dépit de circonstances qui ont pu être traumatisantes.
Il s'agit donc d'une forme d'aptitude à se rétablir après une perturbation extérieure. Alors on distingue très souvent dans cette résilience une résilience qui est à construire après un contexte dit « à risque » de jeunes, en l'occurrence ici, ou d'enfants qui ont vécu une forme d'adversité forte, voire chronique.
Mais cette adversité peut prendre aussi des formes plus simples celle que l'on observe dans les relations qu'il y a entre pairs et donc les jeunes qui doivent faire preuve de résilience pour pouvoir avancer dans leur parcours scolaire vont être amenés à rebondir sur des difficultés de tous ordres et de se remettre de traumatisme vécu pour certains d'entre eux. Alors, les travaux de Marie Anaut qui est une chercheuse de l'Université de Lyon, posent qu'il y a dans la résilience individuelle d'un jeune en général, deux phases. Une première phase qui est une phase de résistance par rapport à la protection psychique nécessaire pour continuer à vivre.
Et cette réaction face à un choc traumatique qui a pu être vécu avant d'arriver en France pour ces jeunes venant d'Ukraine, par exemple, est une réaction de protection face à l'envahissement de l'angoisse. Un mécanisme de défense d'urgence, un mécanisme d'une certaine manière salvateur et puis une deuxième phase peuvent venir quelques jours, quelques semaines, voire quelques mois après, ce qui est une phase d'élaboration, de reconstruction, d'intégration de l'expérience traumatique et d'abandon des défenses d'urgence qui ont été manifestées dans la première phase. Cette deuxième phase est une phase de créativité et d'intellectualisation, voire de sublimation de l'expérience vécue et donc une phase qui manifeste véritablement la résilience.
Et donc, dans ces changements de comportements que l'on observe à l'école, qu'il s'agisse de résilience, mais qu'il s'agisse aussi parfois de comportements qui deviennent agressifs, des comportements de renoncement, de repli. Ces changements de comportement doivent être l'objet d'une attention particulière de l'équipe et parce qu'ils manifestent souvent des besoins, un besoin de confiance, de justice, un besoin de reconnaissance, un besoin de sécurité qui sont des besoins fondamentaux. Et ces besoins ne peuvent être identifiés qu'à travers les émotions que l'on peut plus ou moins repérer chez les jeunes dès lors que l'on parle avec eux, dès lors que l'on s'ouvre à leurs difficultés de comportement, leur difficulté à vivre à l'école ou dans leur vie personnelle.
Alors, accueillir une émotion ? Qu'est-ce que cela veut dire ? L'émotion, dans la majorité des situations, exprime un besoin, un désir ou une attente que l'enfant, l'adolescent ressent comme important, comme impérieux. Ressentir que son émotion est accueillie permet à cet enfant, ce jeune, d'accéder plus facilement à l'expression de son besoin, de son désir ou de son attente. Ressentir que son besoin ou son désir est entendu et compris par l'adulte, lui permet de supporter la frustration, de ne pas être satisfait dans l'immédiat et de se libérer ou d'apaiser son mal-être. Cet accueil des émotions suppose d'accueillir la parole de l'enfant et parfois, de se faire aider d'un traducteur ou d'un dispositif de traduction pour se faire comprendre à travers les quelques mots que l'on va pouvoir mobiliser, les quelques expressions pour amener cet enfant, ce jeune, à s'exprimer. Cette expression des émotions va de pair avec l'expression verbale ou paraverbale, c'est à dire le ton, le non verbal des signes que donne l'enfant dans des signes d'expression.
On peut aussi utiliser comme mode d'expression le dessin, notamment pour les enfants, les adolescents et les jeunes, offrir un espace de parole collectif ou individuel, un cadre contenant, à la fois sécurisant, libre et protégé par des règles éthiques où on ne juge pas l'enfant qui s'exprime, on respecte ses émotions. Il y a une confidentialité vis-à-vis de ce qu'il va partager. Tout ce dispositif d'espace de parole individuel ou collectif dans lequel un jeune va pouvoir exprimer ses émotions suppose de se former un peu à l'écoute, centrée sur la personne à l'écoute rogérienne qui, notamment, repose sur trois piliers la compréhension empathique de ce que vit l'enfant, le jeune. Le deuxième pilier, c'est la congruence, la capacité à être soi-même et enfin, cette capacité à être dans une considération positive, inconditionnelle vis-à-vis de ce que l'enfant peut vouloir exprimer ou en tout cas, de ce qu'il ressent.
L'écoute active est un outil pour aider un enfant, un jeune, à conquérir son autonomie. Elle suppose de prendre le temps d'écouter avec attention ce qu'il veut dire, d'accueillir ses sentiments, ses émotions, les émotions intenses, plus d'un ressenti de l'instant et les sentiments des ressentis qui se sont installés dans la durée. Ça suppose de faire confiance aux capacités de l'enfant à trouver lui-même ses propres solutions, à cheminer lui-même, à résoudre progressivement ses problèmes personnels, ses difficultés, bien sûr avec l'aide des adultes, mais lui faire confiance sans nécessairement le conseiller, le raisonner.
Et il y a là, pour les enseignants qui se forment à l'écoute active, nécessairement un changement de posture pour passer de la posture de l'enseignant sachant, à véritablement là une posture d'écoute. Ça suppose notamment d'accepter de se changer parfois ses opinions, ses représentations, ses a priori, voire ses attitudes vis-à-vis de ce jeune.
Enfin, cette écoute active peut passer par des expressions. Alors avec la barrière de la langue, ce n'est pas toujours simple. Il va falloir se faire aider d'un traducteur des expressions où on reprend, on reformule ce qu’un jeune va dire, du type « alors tu te sens comme si, comme ça tu crois que tu n'aimerais pas que tu sembles être. Tu sembles ceci, tu sembles cela ». Certainement que la barrière de la langue ici pour l'écoute active, va être quand même un frein si on n'est pas aidé d'une personne sur le plan de la traduction.
Trouver les mots justes pour que l'enfant puisse s'apaiser, cheminer, suppose de manifester des moments de reformulation, de répétition, sans jugement, sans commentaires, sans chercher à tempérer ou à minimiser. Cela suppose de refléter les émotions que l'enfant, le jeune a du mal parfois à exprimer, de le faire avec des mots simples, de le faire en cherchant l'approbation de cet enfant, ce jeune.
Cela suppose de l'accueillir lui-même dans ses propres émotions, en tout cas de l'aider à accueillir lui-même ses propres émotions en lui expliquant que ses émotions sont des alliées et que ce sont des indicateurs de ce qu'il peut ressentir sur le plan de ses besoins.
Enfin, pour terminer, dire que l'accueil des émotions est un processus relationnel qui est un processus qui favorise le bien-être et favorise notamment la résilience. Alors de nombreux enseignants sont des tuteurs de résilience sans le savoir.
Et les travaux sur le tutorat de résilience mettent en évidence que dès lors que l'on a des exigences élevées, des objectifs réalistes adaptés à ce qu'a pu vivre l'élève, mais que l'on formule ses exigences avec bienveillance, avec sollicitude, avec patience, avec une attention vis-à-vis des besoins de l'enfant, dès lors que l'on prend le temps de connaître ce jeune, cet enfant, l'environnement dans lequel il évolue. Dès lors qu’on l'amène à repérer les forces qui sont les siennes, ses aptitudes personnelles et qu'on l'aide à interpréter ce qu'il a pu vivre de difficile de manière positive, qu'on l'aide à adopter une forme de flexibilité mentale tournée vers une analyse plus positive de ce qu'il a pu vivre et qu'on l'aide à privilégier, privilégier ses émotions positives. On est dans une posture qui favorise sa résilience. Enfin, pour terminer sur ce sujet, toutes les pédagogies qui participent de la coopération, de l'aide à l'élaboration d'un projet de pédagogie qui sont des pédagogies responsabilisantes sont des démarches qui favorisent la résilience chez les jeunes.
2 - Faire classe en intégrant des enfants arrivant de zones de conflits
Le parcours m@gistère propose des outils, y compris très pratiques, permettant de définir les besoins des élèves pour adapter et différencier la pédagogie. Des repères concernant la scolarité et les spécificités linguistiques ukrainiennes sont fournis pour aider à mieux accueillir et accompagner les élèves.
Des informations complémentaires sont disponibles sur la page éduscol « Ressources pour l'accueil et la scolarisation des élèves allophones nouvellement arrivés (EANA) ».
Les ressources proposées sur la page éduscol « Évoquer la crise ukrainienne avec les élèves » permettent quant à elles d’éclairer divers aspects de ce conflit, à différentes échelles de temps, et fournissent les moyens pour décrypter le flux d'informations.
3 - Le suivi des enfants et des jeunes : des signes d'alerte à connaître, des relais à mobiliser
Le suivi éducatif des élèves revêt une dimension encore plus prégnante dans la gestion de l’accueil des élèves en provenance d’une zone de conflit. Une bonne prise en charge de l’élève passe par la capacité à identifier les difficultés rencontrées mais aussi à mettre en œuvre un suivi adapté.
Thierry Baubet explique ici quels sont les signaux d’alerte auxquels être vigilant et comment réagir en cas de crise émotionnelle.
Signaux d'alerte et points de vigilance
C'est une question difficile puisqu’en cas de crise émotionnelle au milieu de la classe, il faut à la fois s'occuper de l'enfant qui fait cette crise et puis s'occuper du reste de la classe. Concernant l'enfant, la meilleure stratégie sans doute, c'est de permettre qu'il puisse sortir rapidement de la classe et passer un temps avec un adulte. Je sais que c'est difficile à organiser, mais c'est néanmoins utile. Et ce temps-là, on peut utiliser des techniques simples de retour au calme, de relaxation. Ça peut être pétrir des balles, ça peut être marcher avec l'enfant, ça peut être respirer.
Les exercices de respiration, etc. Et respirez sur ses doigts, comme si les cinq doigts étaient les cinq bougies d'un gâteau d'anniversaire et qu'on est un parent. Et en soufflant bien à fond. Chaque adulte, j'imagine, connaît quelques petits exercices de relaxation comme ça, qu'il peut mettre en œuvre et très souvent, ça revient assez vite à l'état normal et l'enfant doit pouvoir ensuite réintégrer la classe. Après, la question c'est qu'est ce qui peut être dit à la place? C'est quelque chose de compliqué que je me représente, moi, de ma place un petit peu moins.
On doit faire avec, sans doute besoin, la nécessité de dire quelque chose. Parce que, qu'il se passe un événement comme ça et que personne ne dise rien, c'est juste très bizarre. Et puis le respect en même temps du secret, de l'intimité de l'enfant et de ses problèmes et de sa vie.
Est-ce qu'on peut parler d'émotions très fortes qui sont des choses personnelles et qui remontent? Est-ce que c'est déjà trop? Je pense que chaque enseignant doit y réfléchir tout en veillant à bien protéger cette confidentialité.
L'affaire des traumatismes de l'enfant n'a pas être une affaire publique. Par contre, il faut sans doute trouver des choses pour arriver à parler un peu sur ce comportement, sans dévoiler trop l'intimité de l'enfant.
Alors, un autre point important pour ces enfants et de vigilance, c'est finalement tous les symptômes. Une trop grande fatigue, par exemple. Ça peut être le signe que l'enfant ne dort plus parce qu'il est très, hyper vigilant. Des difficultés cognitives ou d'apprentissage. Ça peut être le signe que l'enfant est complètement parasité par des contenus traumatiques dont il n'ose pas forcément parler.
Donc, je pense qu'il faut être un peu vigilant à tout. Et quand il y a quelques symptômes, regarder un peu si on a l'impression qu'il y a les autres et demander l'avis des psychologues. Un dernier point quand même, qui est important, c'est que les traumatismes et la fuite, c'est de la passivité et de l'impuissance.
On a quand même réussi à fuir. C'est quand même une situation d'impuissance et de passivité. Et je crois que pour tous ces enfants qui sont exilés comme ça après des situations de guerre, c'est vraiment bénéfique de beaucoup valoriser leurs compétences et de leur donner des responsabilités, c'est-à-dire qu'ils soient chargés de quelque chose dans la classe ou leur confier comme ça des choses, c'est extrêmement important. C'est très valorisant et ça les remet en position d'être des acteurs et pas juste des récepteurs submergés par tout ce qui se passe autour d'eux. Il y a une chose importante aussi quand on a vécu des traumatismes graves, c'est qu'on a peur que si on les dit, qu'on les exprime, ça détruise tout, tout soit détruit. Et pour l'enfant, de voir que même si c'est toutes ces émotions terribles, le submergent, qu'il est emporté par la rage ou par une crise émotionnelle, eh bien qu'on s'en occupe.
Et que ça ne désorganise pas tout, que l'enseignant n'est pas complètement déboussolé, qu'il ne se met pas à pleurer, que la classe continue, que l'école continue, que tout tient quand même et qu'il peut y revenir. Ça, c'est vraiment très important aussi que comme expérience pour la suite.
Vous retrouverez dans le parcours m@gistère des vidéos complémentaires de Régis Astruc et de Stéphane Villar :
- Régis Astruc, IA-IPR établissements et vie scolaire, éclaire la notion de « faire équipe » et donne des conseils sur la mise en œuvre de l’accompagnement au sein des établissements.
- Stéphane Villar, inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche, souligne l’importance de se situer dans un collectif partenarial pour une prise en charge globale des élèves.