Je souhaite construire un projet sur la prévention des conduites addictives
Dispositifs expérimentaux : des programmes de prévention des conduites addictives
L'acquisition par les élèves, dès leur plus jeune âge, de savoirs et de compétences psychosociales qui les protègent contre les conduites addictives, avec ou sans produit, peut s'appuyer sur le déploiement de dispositifs expérimentaux mis en place dans le cadre de partenariats.
Ces actions sont mises en œuvre à partir de programmes validés scientifiquement, réalisés par une communauté enseignante et de santé formée à la prévention du développement des compétences psychosociales, et comprenant des ressources pédagogiques qui permettent leurs mises en place.
Ces programmes s'appuient sur le diagnostic de territoire, s'adaptent au besoin du public cible et sont mis en place par la communauté éducative dans le cadre du comité d’éducation à la santé, à la citoyenneté et à l’environnement (CESCE).
Les programmes développés en partenariat avec l'association l'Arbre des connaissances
Le programme MAAD (Mécanisme des addictions à l'alcool et aux drogues) et la plateforme MAAD Digital
Le site MAAD-Digital.fr est un média d'information scientifique sur les addictions dont toutes les ressources, vidéos, animations et articles, sont vérifiées scientifiquement par des chercheurs spécialisés dans le domaine des addictions. La mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA), l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et l'association pour la promotion des sciences et de la recherche (L'Arbre des connaissances), association agréée par l’Éducation nationale, mettent à disposition de nombreux articles de vulgarisation scientifique sur la thématique des addictions. Le référencement des articles permet aux collégiens et lycéens d’accéder à des informations adaptées à leur niveau et leur âge. Un espace dédié aux professeurs comprend des fiches pédagogiques que vous retrouverez ci-après et un ensemble d’articles. Ces ressources peuvent être utiles aux professeurs pour construire leurs cours, actualiser leurs connaissances et élaborer des projets pédagogiques en faisant du lien avec d’autres éducations transversales telles que l’éducation à l’alimentation.
Alcool, tabac, cannabis, cocaïne, héroïne, ecstasy, des mots familiers souvent associés à drogue et dépendance. Mais qu'en est-il ?
Sommes-nous tous égaux face à ces substances ?
Quel impact ont-elles sur notre cerveau ? Notre corps ?
Pour le découvrir, rejoignez l'univers MAAD Digital, le média d'information scientifique sur les addictions.
Vous avez entre 13 et 25 ans ? Découvrez MAAD-digital.fr, un site réalisé par des chercheurs. Articles, vidéos, quiz, infographies, un contenu original, validé par des scientifiques, et évalué par un comité de jeunes relecteurs.
Testez le MAADbot sur Messenger, un programme d'intelligence artificielle pour jouer, discuter et poser vos questions sur l'addiction.
Et pour ne rien rater des actualités de MAAD Digital, suivez-nous sur les réseaux sociaux, Facebook, Twitter, Youtube et Instagram.
En bonus, pour les enseignants et les éducateurs, des fiches pédagogiques à télécharger pour aborder les conduites addictives dans un cadre scolaire.
MAAD-digital.fr une réponse scientifique et ludique à toutes vos questions sur les addictions.
Ces fiches constituent des pistes pour construire un projet pédagogique sur la prévention des conduites addictives. Elles ne sont pas exhaustives et peuvent être complétées par les ressources disponibles sur le site MAAD-digital.fr. Consulter la présentation destinée aux enseignants et télécharger les fiches :
Des ressources utiles à la communauté éducative pour enrichir les projets de prévention des conduites addictives
L’addiction c’est quoi ?, un article rédigé par Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm et Alain Rigaud, psychiatre des hôpitaux, président de l’association Addictions France
Abécédaire MAAD, le lexique sur les conduites addictives
Dossier – Neurotransmetteurs et substances psychoactives : dopamine ; sérotonine, des articles rédigés par Jean-Antoine Girault, médecin et directeur de recherche à l’Inserm, Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm et Luc Maroteaux, directeur de recherche à l’Inserm
Tolérance et addiction, un article rédigé par Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm
Que devient la substance dans l’organisme ? Différentes substances traitées : tabac, alcool, cannabis, cocaïne, poppers, etc. ; infographies réalisées par Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm et Isabelle Andreani, consultante, enseignante et auteure
Quels sont les liens entre stress et addiction ?, un article rédigé par Sébastien Parnaudeau, chercheur en neurosciences, François Tronche, directeur de recherche en neurosciences au CNRS et Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm
Stress et addiction, une vidéo élaborée par Sébastien Parnaudeau, chercheur en neurosciences et François Tronche, directeur de recherche en neurosciences au CNRS
Quand l’addiction se superpose au stress post-traumatique, un article rédigé par Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm
Dopage et addiction dans le sport de haut niveau, un article rédigé par Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm et Jean Bilard, docteur et professeur en psychologie
Peut-on parler d'addiction au sucre ?, un article rédigé par Serge H. Ahmed, directeur de recherche à l’Institut des maladies neurodégénératives
L’anorexie est-elle une forme d’addiction ?, un article rédigé par Nicolas Ramoz, chercheur à l’Inserm, centre de psychiatrie et neurosciences et Philip Gorwood, professeur des universités et praticien hospitalier
L’addiction touche-t-elle aussi notre deuxième cerveau ?, un article rédigé par Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm
Quelle est l’influence des autres dans la consommation de substances psychoactives ?, un article rédigé par Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm
Impulsivité et addiction, un article rédigé par Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm
Comment les substances psychoactives affectent-elles l’immunité ?, un article rédigé par Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm
L’addiction est-elle une maladie génétique ?, un article rédigé par Nicolas Ramoz, chercheur à l’Inserm, centre de psychiatrie et neurosciences et Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm
Ctrl+F sur les drogues avec DirtyBiology « Le paradoxe des drogues agréables », une vidéo élaborée par le vidéaste Léo Grasset
Mammifères et plantes psychoactives : les liaisons mystérieuses, un article rédigé par Serge H. Ahmed, directeur de recherche –à l’institut des maladies neurodégénératives
Des drogues dans l’eau potable ?, un article rédigé par Bertrand Nalpas, médecin et directeur de recherche à l’Inserm
Le programme « Jouer à débattre sur les addictions » (JADA)
Constituez des équipes et faites entrer vos élèves dans une fiction et un rôle afin de les amener à comprendre les mécanismes de l'addiction et à les sensibiliser aux effets des conduites addictives sur la santé.
« Nous sommes en 2052. Avec le réchauffement climatique, les terres qui étaient restées gelées aux pôles depuis des dizaines de milliers d'années sont en train de fondre. Restés prisonniers de la glace : des gaz, des virus, des bactéries, mais aussi des vestiges préhistoriques reviennent à la surface, et des aventuriers de toutes sortes partent à leur découverte. » - Extrait de l'introduction mettant en situation le jeu.
Porté par l'association de chercheurs L'Arbre des Connaissances, le support pédagogique « Jouer à débattre sur les addictions » (JADA) est développé dans le cadre d'un partenariat entre l'éducation nationale et la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca).
Suivant une méthodologie de co-construction avec des chercheurs, des enseignants et des élèves, deux établissements ont été associés à la conception du jeu en 2018 - 2019 : le collège Auguste Janvier à Amiens et le Lycée Pauline Roland, à Chevilly Larue.
Ce support qui s'appuie notamment sur les contenus du média MAAD Digital permet, à travers un jeu de rôle, d'intéresser les élèves de la 3e à la terminale à des informations scientifiques relatives aux causes et mécanismes des addictions.
Ce programme est une déclinaison du dispositif « Jouer à débattre » (JAD) expérimenté sur les thèmes de l'humain augmenté, la biologie de synthèse et l'intelligence artificielle, qui a montré sa pertinence pour ce qui est du renforcement des connaissances scientifiques et des compétences psychosociales des jeunes.
La plaquette de présentation du jeu « Jouer à débattre sur les addictions » (JADA) renseigne de manière non exhaustive les programmes d'enseignement du cycle 4 à la terminale de la voie générale et technologique et de la voie professionnelle au sein desquels peut s'inscrire une séance JADA.
Les programmes développés en partenariat avec la Fédération addiction
Le programme Unplugged
Unplugged est un programme de prévention des conduites addictives en milieu scolaire, destiné aux adolescents de 12 à 14 ans, qui met particulièrement l'accent sur l'alcool, le tabac, le cannabis et les risques engendrés par une surexposition aux écrans. Ce programme favorise les aptitudes intrapersonnelles des collégiens (confiance en soi, expression de soi, respect des autres). Il invite également à décrypter les attitudes positives et négatives à l'égard des produits, les influences et attentes du groupe, les croyances sur les produits et leurs effets. Il encourage enfin le développement des habiletés interpersonnelles de communication, d'affirmation et de conciliation.
Le programme comprend 12 séances interactives d'une heure, ainsi que deux séances avec parents, menées par des enseignants formés (en lien avec un professionnel de la prévention).
L'impact du programme a notamment été évalué sur le site d'Orléans par Santé Publique France dans le cadre de la Commission interministérielle de prévention des conduites addictives (CIPCA) et les résultats ont pu faire émerger :
- des effets bénéfiques sur différents médiateurs ciblés : croyances normatives, attitudes positives vis-à-vis des drogues, résistance à la pression des pairs, le développement des compétences psychosociales ;
- des effets sur les expérimentations de tabac, cannabis et les épisodes d'ivresse ;
- un effet plus important sur les élèves issus des établissements ayant un taux de réussite plus faible au brevet.
Pour se procurer les outils pédagogiques réédités en 2019 (livret intervenant, livret élève), contacter la Fédération addiction :
Unplugged a été retenu par la Commission interministérielle de prévention des conduites addictives (Cipca) pour procéder à une évaluation de l'efficacité du programme de prévention des conduites addictives. L'évaluation a été menée par Santé Publique France en partenariat avec la Mildeca durant l'année scolaire 2016-2017.
Unplugged est mis en oeuvre depuis 2013 dans le Loiret par l'Association pour l'écoute en addictologie et toxicomanies (Apleat).
Les résultats montrent que le programme est bénéfique sur chacun des indicateurs de consommation récente. Le fait de participer au programme Unplugged diminue significativement la probabilité d'avoir consommé une cigarette, d'avoir été ivre ou d'avoir consommé du cannabis dans les 30 derniers jours.
De même, la participation des élèves au programme se répercute positivement sur la probabilité d'avoir expérimenté chacun des comportements de consommation.
En outre, les effets positifs du programme semblent plus importants pour les collégiens sur lesquels pèsent certains facteurs de risque (faible niveau scolaire rapporté, environnement socioéconomique défavorisé).
Au total, l'évaluation montre l'efficacité à court terme de l'adaptation du programme Unplugged dans le Loiret sur les consommations récentes et initiatives de consommation.
Primavera
Primavera est un programme de prévention des conduites à risques et addictives par l'approche expérientielle. Ce programme s'adresse aux élèves du CM1 à la 5e.
Le programme Primavera a pour objectif de développer et valoriser les compétences psychosociales chez les plus jeunes (gestion des émotions, prise de conscience de leurs qualités et limites, communication avec les autres, résister à la pression du groupe), de prévenir les conduites à risques et éviter le passage à l'acte à l'adolescence (violences, harcèlement, addictions, tensions de genre, risques pour la santé), d'améliorer le climat de classe (relations au sein du groupe, gestion des conflits, participation et concentration des élèves en classe), enfin, d'aider les équipes éducatives et les acteurs locaux à s'emparer de la question des compétences psychosociales et de promotion de la santé de manière générale.
Ce dispositif a été expérimenté dans l'académie d'Amiens et est déployé progressivement dans d'autres académies (Paris depuis 2015).
Le programme Good Behavior Game (GBG)
Good Behavior Game ou « le jeu du comportement adapté » consiste en une stratégie de gestion du comportement en classe. Il s'appuie sur des diagnostics locaux et a déjà fait ses preuves aux États-Unis, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et en Belgique. C'est un dispositif de prévention des comportements à risques chez les élèves scolarisés en primaire. Il a pour objectif de renforcer les compétences psychosociales des élèves et d'apaiser le climat scolaire.
Il est expérimenté depuis cinq ans dans l'académie de Nice. L'objectif de ce programme est d'aider les enfants à mieux assumer leur rôle d'élèves, mais aussi à développer leurs compétences psychosociales, dans le but de favoriser leur bien-être et leur insertion sociale dans leur vie future d'adultes. Les bénéfices attendus au long terme sont la réduction des inégalités sociales de santé, et particulièrement la prévention des conduites addictives (diminution des risques liés à l'abus d'alcool ou à la dépendance de 35 %), la prévention du suicide (diminution de 47 % des tentatives de suicide et/ou pensées suicidaires à l'âge adulte) et des troubles de la personnalité antisociale, ainsi que la prévention de la délinquance.
Actuellement, 29 établissements expérimentent ce programme dans les académies de Nice, Orléans-Tours, Normandie, Reims et Créteil. 318 enseignants ont été formés et le programme a pu concerner 5 960 élèves.
Pour davantage d'informations sur le programme, consulter le site du groupe de recherche sur la vulnérabilité sociale (GRVS) qui contribue, entres autres partenaires locaux professionnels de la prévention, au déploiement du programme.
La video ci-après illustre le retour d'expérience de plusieurs enseignants d'une école REP + de l'académie de Nice qui ont mis en oeuvre le programme. Ces témoignages expliquent dans quelle mesure le programme GBG a pu leur apporter au quotidien (renforcement de l'écoute, de l'estime de soi et du respect des élèves les uns pour les autres) dans leurs pratiques professionnelles et en faveur de la réussite des élèves.
Programme Good Behavior Game-FRANCE
École Jacques Prévert - Académie de Nice - 2019-2020
Marion Fiorentini – Gaëtane Goffeaux – Laura Loustalot –
Valérie Mahé – Fanny Succo – Nina Thisse
Question : Pour commencer, pourriez-vous nous détailler votre contexte de travail ?
Laura L. : Je suis enseignante en REP+ en CM1 depuis cinq ans, ici, à l’Ariane, à Nice, et chaque année, nous avons notre lot d’élèves un petit peu difficiles.
Fanny S. : Je suis coordinatrice ULIS, donc j’ai des élèves en situation de handicap. C’est un petit groupe, ils sont huit, du coup… Il y a des handicaps différents, avec des niveaux différents et en moyenne ils sont tous…Ils n’ont pas un niveau plus haut que le CE2, mais ils ont pourtant 10 ou 11 ans.
Gaëtane G. : Alors, je suis enseignante à l’Ariane, en REP+, en CP. Je suis ma classe de CP en CE1.
Nina T. : Alors, je suis enseignante en CE1, en REP+, dans les Alpes-Maritimes, et j’ai actuellement douze élèves, parce que je suis dans un système de dédoublement de classe, pour favoriser un apprentissage plus individualisé.
Valérie M. : Je suis enseignante, donc en REP+. J’ai une classe dédoublée de quinze élèves, ce sont des CE1. Pour autant, j’ai des cas un petit peu particuliers aussi dans ma classe, j’ai des troubles du comportement.
Marion F. : Je travaille en REP+, dans un quartier considéré un peu difficile. Et donc, je fais partie des effectifs dédoublés. L’année dernière, j’avais des CP dédoublés et j’étais en GBG ; cette année, j’ai suivi ma classe en CE1 dédoublé, donc j’ai quatorze élèves en moyenne.
Question : Depuis quand pratiquez-vous le programme GBG dans votre classe ? Au commencement, quelles étaient vos motivations et/ou vos réticences ?
Fanny S. (ULIS) : J’ai commencé le GBG en septembre 2019, donc de cette année. Je m’étais déjà inscrite l’année passée, mais je n’ai pas pu le suivre. Mais ce n’était pas plus mal parce que, finalement, j’ai pu voir ce qu’en avaient pensé mes collègues l’an dernier, suivre et beaucoup parler, enfin elles m’ont beaucoup parlé de ça. Et du coup, elles m’ont motivée par rapport aux résultats qu’elles ont eus avec les élèves, les progrès dans le travail en groupe, leur façon d’enseigner qui était différente. Elles se sentaient mieux finalement, dans leur classe. Ce sont mes collègues qui m’ont motivée.
Laura L. (CM1) : L’année dernière j’ai commencé le programme GBG et c’était une année assez exceptionnelle pour moi puisque, l’année dernière, j’avais une classe extrêmement difficile avec huit garçons perturbateurs.
Nina T. (CE1 dédoublé) : Je ne commence que depuis cette année, donc depuis le mois de septembre, nous sommes actuellement au mois de mars. J’avais vraiment envie de trouver quelque chose de nouveau. Tout le monde nous parle de diverses pédagogies, Freinet, Montessori. Et justement moi, j’ai envie de montrer à tout le monde que nous aussi on peut faire des pédagogies, dans l’Éducation Nationale, qui sont adaptées à chacun, qui utilisent des choses qui ont été testées et prouvées dans d’autres pays, et que, nous aussi, on est capable d’amener nos élèves au meilleur d’eux-mêmes.
Laura L. (CM1) : L’esprit GBG c’est quelque chose que j’avais un petit peu dans ma classe, mais que je ne pratiquais pas au quotidien. L’idée de faire des équipes, l’idée de s’entraider, de se valoriser, de parler correctement, était bien évidemment quelque chose que j’essayais de mettre en place chaque année, mais… Des temps comme ça, où tout était regardé, calculé, avec des croix, où tout pouvait être analysé, des plages horaires où je pouvais tout analyser de loin, je n’arrivais pas à le faire au quotidien. J’essayais, de temps en temps, de lancer une remarque à droite, à gauche, de faire remarquer quand un comportement était un peu déviant mais…
Disons que ce n’était pas instauré. Et la motivation, ça a été de me dire : je vais instaurer ça au quotidien, je vais m’y atteler, une sorte de… Une sorte de rigueur, voilà. Je l’ai fait parce que je me suis dit : ça va être rigoureux.
Marion F. (CE1 dédoublé)
Je pratique le GBG depuis deux ans. Mes réticences je n’en avais pas vraiment, je suis nouvelle enseignante. Disons qu’en tant que nouvelle enseignante, quand on m’a présenté le projet, c’était un vrai outil pour moi de gestion de classe, et je me suis dit que j’avais envie de tenter l’aventure, pour essayer, pour voir si ça me convenait.
Laura L. (CM1) : La présence régulière d’un coach qui vient, et donc je dois faire la séance sur la plage horaire du coach. Donc, s’il vient en français, je dois faire une séance de français GBG alors que peut être, ce n’était pas à ce moment-là que j’aurais aimé la faire, ou en mathématiques. Et, en fait, je me rends compte que toutes les séances, au final, peuvent être adaptées en GBG, sans que moi ça me contraigne outre mesure, ou que ça me demande énormément de temps ou de mal, de changer ma séance de français classique en séance GBG, ou ma séance de mathématiques en GBG ; en fait, tout peut s’adapter, ou d’EPS, etc… Donc, en fait, voilà, ma réticence du départ, c’était de ne pas choisir l’horaire et la séance et au final, elle s’est complètement dissipée, cette réticence.
Question : En réalisant plusieurs séances GBG chaque semaine dans votre classe, quels ont été les bénéfices obtenus pour vos élèves ?
Marion F. (CE1 dédoublé) : Alors, moi vraiment, le premier bénéfice, je trouve que c’est au niveau de la connaissance de soi par rapport à chacun des élèves, donc qui permet après l’estime de soi. Donc mes élèves : que ce soient les plus discrets qui ont appris qu’ils avaient aussi leur mot à dire dans un travail de groupe ; ou que ce soient ceux qui faisaient le plus de bruit et qui ont compris aussi leur force, ou quand ils pouvaient se mettre en retrait ; et ils ont aussi appris à écouter les autres. Je trouve que chacun a pu apprendre quelle place il pouvait prendre dans le groupe et quelle place il pouvait laisser à l’autre.
Laura L. (CM1) : L’année dernière, quand j’ai commencé le GBG avec cette classe extrêmement difficile, je me suis rendu compte que ça avait eu des effets extrêmement bénéfiques sur le travail de groupe. Puisque, ils réussissaient à travailler au départ ¼ d’heure en groupe, sans se distraire, sans parler d’autres choses, et en fin d’année, j’arrivais à faire des matinées entières de trois heures de GBG complètes, sans aucune dispute, sachant que tout le monde était au travail et prêt à sa tâche. Donc, je trouvais ça… Un avantage énorme pour le travail de groupe.
Fanny S. (ULIS) : Vu que j’ai des élèves un peu particuliers, ce qui a été le plus flagrant c’est qu’ils osent tous se mettre au travail sans mon aide en fait, parce que ce sont des élèves qui ont une histoire de l’échec en fait, et ils ont souvent besoin que l’adulte soit à côté d’eux. Et là, ils arrivent, avec le GBG, à se mettre au travail sans moi, à bien être attentifs aussi lors de la passation de la consigne, pour réussir au mieux parce qu’après, ils savent que moi je ne peux plus les aider, donc ça, ça a beaucoup changé. Et aussi par rapport au fait que, ils commencent à savoir chacun, quels sont leurs points forts, quels sont leurs points faibles. Donc, chacun arrive à trouver une place et à se mettre en valeur, à un moment donné, dans les jeux que je pratique.
Laura L. (CM1) : Ces séances GBG quotidiennes infusent sur le comportement général de la classe, et donc dans toutes les activités, ils arrivent à se parler correctement et à se sentir valorisés. Du coup, plus personne est dans…, n’ose pas parler, plus personne ne se sent rejeté, exclu. Ils savent qu’ils peuvent tous s’exprimer sans être jugés et leurs paroles seront accueillies avec bienveillance, déjà entre pairs, ce qui est déjà un énorme bénéfice.
Valérie M. (CE1 dédoublé) : Je voudrais vous parler de ma petite autiste [prénom coupé]. Hier, on a fait un travail avec elle, mais c’était vraiment fantastique. Parce que c’était une petite fille, au début, qui refusait de se mettre au travail, parce qu’elle disait « il pleut, j’ai peur de l’orage ». Et au fur et à mesure, elle s’est sentie en confiance, dans le même cadre de travail, avec des rituels, avec des règles simples, avec une consigne claire. Elle a commencé à se mettre au travail toute seule et ensuite à communiquer avec l’équipe. Il y a eu même une fois où j’ai pu lui faire annoncer les résultats, à elle, et elle m’a montré qu’elle avait compris ce qu’il fallait faire : ça, c’était énorme, c’était ma plus belle réussite de l’année dernière.
Gaëtane G. (CP dédoublé) : Les bénéfices pour les enfants, c’est le travail de groupe, la coopération. Pour moi, je trouve que ça joue énormément, ils sont capables de travailler en groupe, à trois, quatre, cinq, tout en suivant quatre règles qui sont très faciles, et en fait, qui nous permettent à nous aussi de mettre tout ce qu’on veut dedans.
Nina T. (CE1 dédoublé) : C’est vrai que moi j’avais une classe qui n’était pas très difficile en termes de comportement, si ce n’est deux élèves ; et au début, je me suis dit « Oh, la, la ! Comment je vais faire pour les intégrer à l’intérieur de ça ? ». Et en fait, on se rend compte, qu’au fur et à mesure, les élèves s’aident tellement entre eux, que ces élèves-là sont rentrés plus vite dans le projet, que ce que j’aurais pu imaginer. Et, vraiment, on voit les bénéfices pour chacun. C’est une meilleure estime, c’est une meilleure entraide, mais vraiment l’entraide, c’est quelque chose que je n’avais pas au début ; ils ne travaillaient absolument pas en groupe au début, avant que je fasse le GBG, maintenant c’est le jour et la nuit. Donc, vraiment, au niveau de l’entraide, au niveau de la confiance, ils s’encouragent beaucoup, donc ça donne confiance. Ils n’arrêtent pas d’être beaucoup plus gentil les uns avec les autres, donc ça, c’est hyper important, parce qu’ils ne sont plus dans la moquerie, comme ils pouvaient l’être au début. Avant c’était « Ah, t’es nul, tu sais pas faire ça ! », maintenant c’est plus « tu sais pas ? je vais t’aider » ; et ça, c’est juste exceptionnel de les voir s’entraider comme ça. Surtout, que c’est sans notre aide, ce n’est pas nous qui leur demandons de s’aider, c’est eux-mêmes, ils savent qu’ils le font, et ils le font pour un bénéfice personnel, pour la personne qui va aider et pour la personne qui va recevoir, donc c’est vraiment une relation gagnant-gagnant. Du coup, voilà, la coopération, beaucoup plus de cohésion de groupe par rapport à tout ce qu’on met en place, le fait qu’ils travaillent en groupe, qu’ils aient des noms de groupe, moi ils ont même fait des cris de guerre de groupe ! Donc, voilà, une ambiance de classe qui est beaucoup plus positive, liée justement à ces moqueries qui cessent, liée à cette entraide, liée à cette cohésion et cette appartenance à un groupe. Et, puis en plus, ça dépasse, ce que j’expliquais à la formation booster, pour moi, ça dépasse
le stade de l’école, parce que vraiment on sent qu’en tant qu’individu, l’enfant, il progresse énormément. Parce que c’est quelque chose qui va se ressentir aussi en dehors de la classe, en récréation, dans son rôle avec d’autres enfants qui ne font pas forcément le GBG. Dans son rôle en famille aussi, parce qu’on en a déjà parlé avec les frères et soeurs, etc… Donc ce sont vraiment des bénéfices, pour moi, qui sont hyper, hyper élevés.
Question : En tant qu’enseignante, le programme GBG vous a-t-il été utile ?
Nina T. (CE1 dédoublé) : En tant qu’enseignante, j’ai énormément apprécié le fait de remettre en question ma pratique. Parce que, quelque part, quand on vous dit « maintenant vous allez faire des jeux et travailler en groupe », là on se dit « Oh punaise ! Déjà le travail de groupe, c’est des CE1, ils sont petits, et ça veut dire qu’ils vont parler fort. Et puis le jeu, si je leur dis on va jouer, tout de suite, ça va être la foire ». Donc en fait, déjà, les réticences au départ, tu te dis « bon, qu’est-ce qui va se passer ? ». Et en fait, cette remise en cause de ma pratique : dès les premières séances, je me suis dit « mais en fait c’est génial », parce que ça m’a apporté du temps pour observer mes élèves, je les connais beaucoup plus. Quand on les observe, on se rend vraiment compte : ah tiens lui, il est plus leader, lui il est plus suiveur, elle, d’abord elle regarde, elle se dit « qu’est ce qui va se passer ? ». Et, ce qui est intéressant, c’est de voir l’évolution des enfants, parce que quelqu’un qui était plutôt réservé, au fur et à mesure des jeux, on va le voir prendre des initiatives, même tenir tête à certains leaders, etc… Donc ça, c’est hyper intéressant, toute cette remise en cause de ma pratique et de mes réticences par rapport au travail en groupe. Ça m’a fait beaucoup de bien aussi pour… Je ne sais pas… Voir mes élèves d’une autre façon. En fait je les vois jouer et un élève qui joue ce n’est pas la même chose qu’un élève qui travaille, et du coup, j’arrive beaucoup plus à cibler leur sensibilité aussi et les choses sur lesquelles on peut, peut-être, travailler aussi en dehors du GBG, pour chacun. Ça m’a permis aussi de les voir coopérer entre eux et comment je pouvais les associer ou pas ; parce que ça peut être intéressant aussi de mettre tous les leaders entre eux pour voir comment les échanges se font. Et puis après, oui, au moment du débriefing, moi je prends un plaisir fou, à débriefer des séances parce que c’est trop génial de les féliciter tout le temps en fait. C’est-à-dire, quand on se rend compte que dans la vie en général, ça aussi, c’est par rapport à la vie, on est tout le temps en train de pointer du doigt les choses négatives, les choses difficiles, et puis, on ne s’encourage pas assez, on ne se donne pas assez de compliments, et en fait, quand on se complimente tout le temps, on se rend compte qu’il y a plus que le bon qui vient. Et c’est vraiment très ancré en eux. On se rend compte que même les tout-petits enfants, déjà à 7 ans, quand tu leur dis « alors, qu’est-ce qui a marché dans ce jeu ? », direct, ils vont te dire « ah ben ça, ça n’a pas marché ». Et il faut vraiment les forcer à vraiment dire les choses positives et on se rend compte que dès 7 ans ils sont déjà comme ça, donc en tant qu’adultes, nous c’est la même chose. Et, c’est pour ça, que c’est encore une évolution au niveau de la vie en général, et de notre manière de voir la vie et l’apprentissage qui se met en place là-dedans. Donc, pour moi, c’est juste super.
Fanny S. (ULIS) : Ça m’a permis vraiment de faire évoluer ma façon de poser la consigne en fait, ça me permet d’avoir une consigne beaucoup plus claire, qui induit aussi des procédures pour les rendre le plus autonome possible, donc voilà. Ça me permet aussi de me mettre un peu plus à l’écart, de les laisser faire, ce qui est difficile quand on est avec des élèves en situation de handicap, on a l’impression qu’ils ont toujours besoin de nous. Et là, voilà, ça m’a permis aussi de les observer, de mieux comprendre leur fonctionnement, de mieux comprendre justement l’impact du handicap sur ce que je leur propose et de réajuster au fur et à mesure. J’ai vu pas mal d’évolutions sur des élèves qui sont porteurs d’autisme et ça permet à chaque fois aussi, de se poser des questions, « là ça n’a pas fonctionné, comment je vais faire pour la prochaine fois ? ». Il y a une vraie progression pour les élèves et puis pour moi, du coup, dans ma façon de préparer le GBG, de préparer les consignes, de préparer les outils aussi, que je vais leur donner, pour qu’ils puissent être le plus autonome possible.
Gaëtane G. (CP dédoublé): Pour moi, ça a été très positif parce que je n’ai plus du tout peur de faire du travail de groupe, ils sont très autonomes, le niveau de voix est respecté, j’ai horreur du bruit, donc c’est vraiment très agréable de travailler comme ça. Et puis ça a changé aussi des pratiques à moi : la félicitation, c’est vrai pendant le GBG, mais dès qu’un enfant fait quelque chose de particulièrement bien, je le souligne. Ce qui est amusant, c’est de voir tout de suite les autres élèves qui tout de suite applaudissent, à la manière GBG, c’est-à-dire comme des sourds-muets, et ça, on voit que c’est l’esprit de la classe qui change à travers ce jeu.
Marion F. (CE1 dédoublé) : Vraiment c’est cette gestion de classe qui a été simplifiée. Avant je n’avais pas trop réfléchi à la gestion de classe, au cadre auquel me référer. Et là, c’est vrai que c’est facile pour tout avec les élèves, il y a quatre règles, on se réfère à l’une, on se réfère à l’autre, dans toute situation, au niveau de voix ; il y a aussi la notion de respect qui est beaucoup plus claire dans la classe et qui a été affinée grâce à la règle numéro 2, donc voilà, ce cadre-là. Ensuite, moi j’ai une meilleure connaissance de mes élèves parce que la partie observation, moi je l’ai trouvé hyper intéressante, de pouvoir voir ce qu’ils étaient vraiment capables de faire quand ils étaient tout seuls.
Laura L. (CM1) : Comme je ne peux pas me multiplier et aider chacun des élèves en difficulté, qui ont en général des difficultés différentes, le fait qu’ils soient en groupe fait qu’on est plus performant dans l’aide et dans le travail qu’ils apportent. Donc du coup, les élèves peuvent plus progresser chacun individuellement, alors que moi-même, seule, je n’aurais pas pu me dédoubler. Donc, c’est vraiment une aide précieuse que d’être en groupe et de pouvoir compter sur des élèves qui en tutorent d’autres, qui savent le faire et qui le font bien.
Valérie M. (CE1 dédoublé) : Les bénéfices concernant mon poste d’enseignante, ils ont été multiples. En effet, c’est pareil : c’est la réussite de la motivation des élèves par le GBG, la simplification des consignes. Je me suis aperçue tout de suite qu’il fallait que je retravaille ma consigne, en les mettant en fait en action, et en étant moi en dehors de leur travail. Parce qu’on a quand même tendance, en tout cas pour la plupart des enseignants, à être trop, trop présent, trop sur eux, à re-valider, à re-verbaliser, à « re » tout en fait, au final on a l’impression qu’ils n’écoutent même plus en fait, tellement on leur dit des choses. Là moi, comme je suis assez bavarde, c’était bien pour moi, d’être en retrait et de voir un petit peu s’ils avaient compris la consigne et comment ils l’utilisaient cette consigne. Dans mon travail de tous les jours, je dirais, ça m’a permis aussi de réfléchir mieux sur cette consigne et sur la façon dont je les mettais au travail, l’organisation, ça a vraiment clarifié pas mal de choses. Et, au niveau humain, je dirais que c’est fantastique, quand je vois des enfants qui ont des difficultés à être avec les autres, à être en classe, à être en société ; se comporter en équipe, en ayant un travail d’équipe et en disant à l’autre « attends, je vais t’aider, attends, tu comprends pas, je vais t’expliquer », mais ça, c’est un bonheur, au niveau humain, c’est fantastique. Et, en plus, ça permet de s’intéresser aux apprentissages et d’avoir moins cette appréhension, ce manque de confiance en soi, ça permet vraiment de débloquer des choses, je dirais, et pas seulement au niveau scolaire, donc, franchement, je suis enchantée du GBG et si demain, je change d’école, je pense que je pratiquerai aussi dans d’autres écoles.
Le programme ASSIST
Dans le cadre d'un partenariat avec Santé Publique France, l'université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines représentée par le professeur Loïc Josseran, le programme anglais ASSIST est développé depuis la rentrée scolaire 2016-2017.
Le programme est désormais déployé dans 19 académies et s'appuie sur un dispositif de prévention par les pairs. Des élèves volontaires de 5e sont choisis par leurs pairs en tant que « leaders d'opinion », à hauteur de 19,6 % des effectifs de chaque groupe classe). La prévention par les pairs est une méthodologie reconnue comme efficace par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) dans la lutte contre les comportements addictogènes et ayant fait ses preuves au Royaume-Uni.
Dans le cadre de l'atelier citoyen commandité par la MILDECA au SGMAP, et concernant la prévention des addictions, Loic Josseran (Responsable du DIM du GH Pifo, Hôpitaux Universitaires Paris Île-de-France Ouest) apporte son témoignage sur le programme ASSIST.
La France n'est pas réputée pour son engagement ni son originalité dans la prévention. Les campagnes se suivent et se ressemblent dans le fond, la forme, sans pour autant être toujours efficaces. Et d'ailleurs, cette question de l'efficacité n'est pas ou trop peu posée.
La prévention du tabagisme en est un exemple. Depuis maintenant plusieurs décennies, nous voyons passer des brochures, des messages à la télévision, nous les entendons à la radio. Ils changent de forme, de style. Ils peuvent être parfois humoristiques, d'autres fois dramatiques. Mais au final, tous ces messages restent sur le même modèle. Le sachant, une administration, des associations, des scientifiques, délivrent leurs messages à l'ignorant. C'est une transmission verticale.
Ce modèle ne fonctionne peu ou pas. Preuve en est, en France, aujourd'hui, nous sommes l'un des pays européens où la consommation de tabac des jeunes est la plus élevée. Nous avons certainement raté quelque chose.
Depuis peu, une nouvelle dynamique s'est mise en place au niveau de l'autorité sanitaire. Cette dynamique pousse non pas à reproduire systématiquement, mais au contraire à explorer de nouvelles approches. La campagne Mois sans tabac en est un bel exemple.
La mise en place du programme de prévention par les pairs ASSIST, programme anglais, en est un autre, et en l'espèce celui qui nous intéresse.
Commençons déjà par cette logique de prévention par les pairs. De quoi parlons-nous avec cette éducation par les pairs ? Selon la définition communément admise, il s'agit d'une approche éducationnelle qui fait appel à des personnes du même âge, du même contexte social, même fonction, même éducation d'expérience, pour donner de l'information ou pour mettre en avant des types de comportement ou de valeurs.
Il s'agit donc de faire appel aux compétences des jeunes eux-mêmes pour informer ou aider d'autres jeunes, leurs pairs. Il est bien évident qu'il ne s'agit pas de transmettre n'importe quel message. Aussi les jeunes qui deviennent des émetteurs doivent être convenablement formés. C'est une étape clé.
L'éducation par les pairs est une alternative ou un complément aux stratégies traditionnelles. Elle se fonde sur différents postulats faisant le lien avec les caractéristiques de l'adolescence en termes de socialisation. Les jeunes sont souvent des sources d'information pour les autres jeunes de leur âge, de soutien. Ils se tournent plus volontiers vers les leurs quand ils ont des problèmes. De phénomène générationnel et de connaissances, les jeunes sont les mieux placés pour reconnaître et comprendre les problèmes de leurs pairs. Ou encore d'influence sociale positive pouvant permettre l'adoption de comportements favorables.
Bref, elle revient à faire confiance aux jeunes avec une transmission, cette fois-ci horizontale du savoir et utile.
Son objectif est double, d'une part il vise à réduire le nombre de fumeurs en fin de collège de un et demi pourcent, et d'autre part il recule l'âge de la première cigarette. Or, on sait que plus cet âge recule, et plus le fumeur s'arrêtera tôt.
Justement, au sujet d'ASSIST, le programme a été développé à la fin des années 1990 par l'université de Bristol. Il s'appuie sur une méthodologie simple, mais qui a l'énorme avantage d'avoir été utilisée dans plusieurs centaines d'écoles en Angleterre et d'avoir été scientifiquement validée du point de vue de son efficacité à travers plusieurs publications internationales. C'est important, car cela nous permet de sortir d'une prévention approximative à l'efficacité incertaine.
Ce programme est fait pour des collégiens de niveau de cinquième. Il s'agit d'abord de faire élire par l'ensemble des élèves de cinquième ceux qui apparaissent comme des leaders aux yeux des autres enfants sportifs, charismatiques, bons élèves. Ces leaders, nous en France on préfère le terme d'ambassadeurs, sont ensuite formés à la prévention du tabagisme à travers deux jours de formation qui se déroulent en dehors du collège. Pendant cette formation, les enfants vont acquérir des connaissances sur le tabac, vont apprendre à communiquer avec les autres, vont apprendre à développer la relation à l'autre, à prendre confiance en eux. Ensuite, ils retournent en milieu scolaire et il leur est simplement demandé à chaque fois que le sujet tabac est abordé par des camarades, qu'ils interviennent et qu'ils apportent des informations valides, vraies, sur le tabac.
Il leur est également demandé de noter dans les carnets qui leur ont été remis chacune de leurs interventions et le contexte dans lesquelles elles sont intervenues afin de pouvoir suivre ces interventions. Plusieurs réunions de points sont également prévues avec les enfants afin de pouvoir les suivre sur toute la durée du projet qui est de dix semaines.
L'objectif actuel autour d'ASSIST n'est pas de tester son efficacité. Nous considérons que cela a déjà été démontré. Notre objectif au contraire est d'évaluer la faisabilité dans un contexte culturel différent, à savoir un contexte français. Le niveau cinquième est-il le bon ? Les collégiens, les parents, les enseignants acceptent-ils le principe du fonctionnement de ce programme ? C'est à ces questions et à d'autres que nous devrons apporter des réponses avant d'envisager la diffusion large d'un tel programme en France. Ce travail est actuellement mené par le comité national contre le tabagisme et l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines.
Sans cette étape nous prendrions le risque de déployer un programme inefficace, de dépenser inutilement les ressources financières de l'État et de retomber dans un des grands travers français en matière de santé publique, faire sans jamais évaluer ni apprendre de ses erreurs.
La prévention par les pairs n'est certainement pas la seule solution efficace face au tabagisme, mais c'est certainement une partie de cette solution.
Le programme TABADO
Dans le cadre d'un partenariat proposé par l'Institut national du cancer (INCa), le programme « TABADO » a pour objectif d'accompagner les élèves fumeurs de 15 ans et plus à l'arrêt du tabac. Ce programme évalué a démontré son efficacité au sein des CFA Lorrains en 2007-2009 avec un taux de sevrage deux fois plus important dans les établissements où l'intervention s'est déroulée par rapport aux établissements témoins (Minary, 2013).
Le programme est déployé progressivement dans l'ensemble des établissements du second degré.
Ce programme se déroule en 3 étapes :
- une session initiale d'information (1h) sur les effets du tabagisme sur la santé et les étapes du programme pour les fumeurs volontaires souhaitant arrêter de fumer. Cette session concerne tous les élèves, fumeurs et non-fumeurs.
- une consultation individuelle (50 minutes) pour les élèves fumeurs volontaires auprès d'un professionnel de santé. Il donnera des conseils et une aide pour l'arrêt du tabac. Si nécessaire, un traitement de substitution nicotinique pourra être proposé.
- 4 séances collectives (1h) étalées sur 2 à 3 mois (5 à 10 personnes) proposés aux élèves fumeurs, dont l'objectif est de renforcer la motivation à arrêter de fumer. Elles seront associées s'ils les élèves le souhaitent à une consultation de suivi avec le professionnel de santé.
Le programme KUSA
Le programme Kusa vise la prévention des consommations problématiques du cannabis chez les adolescents via une sensibilisation à la gestion des émotions.
Il est porté par la Fondation Santé des Étudiants de France (FSEF). Cette fondation, reconnue d’utilité publique, est une institution de référence de la santé des adolescents et des jeunes adultes, qui gère 26 cliniques et structures médico-sociales. Les programmes de prévention sont conçus et portés par des professionnels de santé, psychiatres, addictologues, psychologues, en lien avec les établissements scolaires.
Le programme KUSA est soutenu par la MILDECA.
Cet outil de médiation, adapté aux collégiens et lycéens, est construit autour d’un manga (disponible en version papier et animée). Il a pour objectif de travailler sur la régulation des émotions et le renforcement des compétences psycho-sociales des élèves. Il est animé par un binôme de psychologues formés à la prévention et aux addictions, en présence d’un personnel de l’établissement jouant alors le rôle de relai avec le reste de l’équipe éducative, ainsi que de repérage et d’orientation des élèves à risque.
Le programme se déploie en trois sessions interactives de 2h avec le même groupe classe au cours desquelles sont travaillés :
- La reconnaissance des émotions et leur gestion
- Les effets de la consommation du produit, notamment sur les ressentis et la gestion des émotions
- La diversité des stratégies de régulation des émotions que l’élève peut développer au quotidien.
Le programme est déployé depuis 2021 en Ile de France avec le soutien de l’Agence régionale de santé et du Fonds de lutte contre les addictions. En 2024, il sera déployé dans deux autres académies.
Une évaluation du programme est en cours et se déroule en 2 phases :
- La phase 1 d’étude initiale a commencé en septembre 2022. Elle vise un premier niveau de preuve afin d’évaluer l’impact du programme chez les adolescents sur les compétences émotionnelles et la consommation de cannabis.
- La phase 2 d’étude à grande échelle commencera en 2024 dans l’objectif de mettre en place un essai randomisé en partenariat avec une université.